J'ai les boules (Général)
J’ai les boules.
Ayant pour l’instant survécu à quelques menues indispositions passagères (cancer, diabète, AVC) je reviens derechef vous pomper l’air avec mes élucubrations plus ou moins horlogères.
En tout premier lieu, je souhaite remercier tous les malades de la montre, les cinglés du chronographe, les toqués du chronomètre et les fadas d’autres « gardes-temps », pathologies chroniques redoutables, quasiment incurables, dont les soutiens nombreux m’ont permis de faire provisoirement face à mes quelques soucis. Fin du chapitre médical.
En second lieu, pour renouer avec mes habituelles sottises, je voudrais vous poser une question :
« Qu’est-ce qu’une boule horaire ? »
- ATTENTION : toute consultation de sites divers du type « Wikipédia » est strictement interdite sous peine de recevoir une volée de béquilles robustes dont je suis présentement équipé.
Afin de vous aider, je précise qu’il n’en reste qu’une en France. Je parle de la boule, pas de béquille. Bien entendu, je ne doute pas que nombre d’entre vous, puits de sciences s’il en est, connaissent la réponse en détail, mais pour les quelques ignorants qui auraient pu se glisser parmi vous, je vais vous donner la réponse :
« Une boule horaire sert à donner l’heure. »
Élémentaire, mon cher Harrison.
Mais comment ça marche ? Très simple. Il suffit de disposer :
- d’une boule creuse d’environ vingt à vingt-cinq pouces de diamètre (en gros, cinquante à soixante centimètres d’aujourd’hui) peinte en noir,
- de quelques toises d’un fort cordage auquel vous fixez solidement la boule,
- d’une tour de deux ou trois perches d’arpent ( quinze à vingt mètres, si vous préférez), astucieusement bâtie sur une colline proche de la mer, surmontée d’un mât et d’une poulie dans laquelle vous faites délicatement passer l’une des extrémités de votre cordage.
-vous hissez alors la boule jusqu’à la poulie, la voici à poste.
- Vous rassemblez un certain nombre de navires à voiles (flûtes, frégates, vaisseaux et autres engins prétendument flottants) mouillés dans la rade.
Après quoi, vous attendez tout en surveillant les alentours de la tour en faisant le tour du chemin de ronde prévu à cet effet autour du sommet de la tour.
A midi pile poil, l’observatoire de la Marine prévu à cet effet vous communique par signal optique ou vocal (« Ohé, Mathurin, c’est l’heure !») qu’il est justement midi pile.
Vous faites alors descendre vivement la boule à l’aide du fort cordage passé dans la poulie jusqu’au chemin de ronde.
Ainsi, les commandants de la flotte mouillée sur la rade, comprenant qu’il est juste midi, peuvent mettre à l’heure exacte (midi) les montres et chronomètres judicieusement mis à leur disposition par les horlogers du roi.
C.Q.F.D.
Notez au passage que les navigateurs de la Perfide Albion utilisaient exactement la même technique, à ceci près que leurs boules à eux entamaient leurs descentes à treize heures. Chacun sait que les Anglais sont capables de faire n’importe quoi, même de rouler à gauche. Sans doute ont-ils perdu la boule…
Permettez moi de vous faire découvrir la première tour sur laquelle fut montée la première boule horaire. (au fond à droite)
Elle se nomme « tour de la Découverte ». Ce n’est pas un phare, mais une tour de guet qui fut érigée sous sa première forme entre 1737 et 1744. Son but était de surveiller la zone maritime s ‘étendant de Belle-Isle aux Glénan et tout particulièrement les contrebandiers rôdant aux alentours de l’île de Groix et la flotte angloise traînant en permanence dans le secteur pour enquiquiner les malheureux navires de la Compagnie des Indes Orientales sur le chemin du retour.
Cette petite tour fut frappée par la foudre et incendiée en 1751. Les Bretons étant têtus, on reconstruit l’engin qui, à nouveau subit par deux fois les foudres de Jupiter en 1782. Bon. On reconstruit une autre tour, plus haute, plus large, surmontée d’un paratonnerre type « Benjamin Franklin », mesurant aujourd’hui, après sa récente restauration entre 2018 et 2020, 38 mètres et 33 centimètres.
[i]Pour changer un peu de sujet, précisons que le sieur Benjamin Franklin, ambassadeur des « insurgeants » américains en France n’est PAS l’inventeur du paratonnerre, mais le créateur d’un des types de paratonnerre conçus à l’époque. On parie combien ?
Revenons à nos boules horaires. La dernière d’entre elles (en France) orne toujours notre tour de la Découverte, mais elle n’est là que pour faire joli et pour me permettre de vous raconter cette histoire. Si vous voulez vérifier, il vous sera permis de gravir les 216 marches puis les neuf échelons qui vous mèneront au chemin de ronde. Je vous attendrai en bas, il y a un joli bistrot.
---
Je tiens beaucoup à ma montre, c'est mon Grand Père qui me l'a vendue sur son lit de mort (W. Allen)
Discussion complète:
- J'ai les boules - capitaine56, 09/11/23, 00:30
- J'ai les boules - ld-1910, 09/11/23, 07:19
- J'ai les boules - mostra, 09/11/23, 08:26
- J'ai les boules - tictalcoolique, 09/11/23, 15:56
- J'ai les boules - mostra, 09/11/23, 08:26
- J'ai les boules - LeonDeBayonne, 09/11/23, 08:34
- J'ai les boules - basyl177, 09/11/23, 11:35
- J'ai les boules - nonosore, 09/11/23, 16:09
- J'ai les boules - Ed the Grocer (modérateur), 09/11/23, 17:22
- J'ai les boules - capitaine56, 09/11/23, 18:44
- J'ai les boules - effe, 14/11/23, 13:37
- J'ai les boules - Dadowatches, 14/11/23, 21:09
- J'ai les boules - dandusgallicus, 16/11/23, 19:38
- J'ai les boules - autrichongris, 20/11/23, 08:37
- J'ai les boules - ld-1910, 09/11/23, 07:19