C'est en effet un livre remarquable, qui traite de l'histoire de l'entreprise et non des différents modèles.
Ecrire sur Rolex est extrêmement difficile puisque l'entreprise ne donne aucune information sur ses archives et ne collabore pas avec les historiens. Donzé les a toutefois prévenu de son travail, ce qui n'a pas modifié la culture du secret de la célèbre firme genevo-biennoise.
Les thèses développées par Donzé, avec brio, sont désormais bien établies : stratégie de capitalisation sur des modèles, la plupart anciens, et utilisation massive de la publicité, en particulier grâce à des agences américaines qui ont façonné le discours Rolex : les hommes importants de la planète portent une Rolex. Par identification, le porteur lambda est fier de de se sentir important.
Si j'ai un seul reproche à faire à cet ouvrage, c'est qu'il arrête son analyse au 20e siècle et néglige ce qui s'est produit à partir de la fin des années 1980 : la spéculation sur la montre-bracelet. Ce qui alimente largement, mais pas uniquement, le succès de Rolex aujourd'hui c'est le fait qu'une Rolex d'occasion peut valoir plusieurs fois le prix du neuf, c'est le fait que la spéculation s'est organisée avec ses codes (descriptif taxonomique des cadrans avec plus ou moins de lignes ou de rouge par exemple) dans le but d'augmenter artificiellement la valeur d'un objet industriel de grande série. Ainsi certains modèles sont "réservés" aux gros acheteurs connus, de telle sorte qu'ils se sentent importants non pas parce qu'ils ont une Rolex, mais parce qu'ils ont "ce modèle là" dont la cote ne peux qu'augmenter.
Ce n'est pas un phénomène isolé : on voit à peu près la même chose avec Patek, avec mois de taxonomie parque la production a été bien inférieure, et même chez Audemars qui souffre d'un manque cruel de modèles anciens de référence, hors Royal Oak. |