capitaine56


Toujours près de la mer,
07/02/18, 18:42
 

Revue de goussets Chonomètre & Chronographe (Général)

Par ce triste temps d'hiver, j'errais dans la baie. Sans but précis, comme toujours quand on erre. Tout à coup, surgirent sous mes yeux ébahis un titre et un prix:
«Chronomètre & chronographe ancien: 10 euros»

«Ciel! Cela se peut-ce?» M'écriais-je dans mon for intérieur.

Et bien oui, cela se peut.

Bien évidemment, je ne rouvrirai pas le vieux chapitre traitant des particularités du chronographe et du chronomètre. Chacun sait comment différencier ces deux piliers de l'industrie horlogère. Loin de moi l'idée de chercher de nouveau qui a commencé, du chronographe ou du chronomètre. Pas question non plus de repartir à la quête de la première montre qui eut droit à la double appellation...mais si, justement! Foin des Omega ou des Rolex, j'avais sous mes yeux (ébahis, je vous le rappelle) une montre qui se targuait d'être les deux à la fois, et pas depuis hier! A la louche, une montre de gousset des années 20/30 du siècle passé.

Il n'était pas question de laisser passer un tel sujet qui ne pouvait que ravir tous les amateurs d'antiques montres de gousset qui hantent ces lieux. Je me jetais donc avec délice dans la quête de ce nouveau Graal horloger. Voici les résultat ebaysques et Googlesques de ma quête. Attention les yeux, ça brûle:

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Cinq d'un coup, dont une version British «specially examined»! J'étais béni des Dieux, sans aucun doute. Dans des états variables, j'en conviens, mais

«le temps aux plus belles choses se plaît à faire un affront»

Puis, enfin, entre dix et cent cinquante euros, pour de telles raretés, vous n'allez pas faire la fine bouche, non?

Admirons de dos les petites merveilles:

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Certaines ont joué les mijaurées et n'ont pas voulu montrer leur côté pile, tant pis. Ce qui compte, ce n'est pas le plumage, mais ce qui se cache dessous, tous les Don Juan de l'horlogerie vous le confirmeront. Hardi petit, soulevons la jupe des belles.

Première découverte, ces raretés sont manifestement d'origine helvétique.

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Bien entendu, leur cote va s'en trouver revigorée. Point de ces fichus calibres extrême-orientaux, mais du bon vieux suisse bien de chez nous. On comprend mieux que ces belles soient restées si longtemps secrètes. Tout le monde connaît la discrétion qui règne outre Jura lorsqu'il s'agit de garder bien caché un trésor.

Et celui-ci en vaut la peine!

Sachez que les ingénieurs et techniciens de haute volée qui se sont attachés à produire ces joyaux de l'horlogerie n'y sont pas allés de main morte. En premier lieu, ils ont dû respecter un cahier des charges qui, quoique bref, s'avère précis et rigoureux. Relisons-le ensemble:

Premièrement:
-Limitation sévère du coût des matières premières.

Secondement:
-Compression drastique des frais de production.

Troisièmement:
-Rien.

Après avoir longuement torturé leurs méninges, nos hardis chercheurs aboutirent aux conclusions suivantes:

Premièrement:
-Suppression totale du moindre composant «noble».

Secondement:
-Simplification extrême de la fabrication.

Troisièmement:
-Pas de troisièmement.

De ce raisonnement appliqué à la lettre résultent les fais suivants:

Premièrement:
Absence totale de tout matériau un tant soit peu précieux. Les mots rubis, or, argent, acier, cuivre rhodié, titane, etc sont bannis

Deuxièmement:
-Suppression radicale de toute ornementation, de tout anglage, de tout polissage, de toute gravure et de tout raffinement. Cela ne sert à rien pour mesurer le temps.

Troisièmement:
-Voir les précédents alinéas.

Cependant et néanmoins, la présence d'un cadran relativement flatteur s'avère indispensable. On rognera donc au maximum sur la qualité de l'acier des aiguilles. Il suffira qu'elles soient assez grosses pour être lues. Quant au cadran, quoi de mieux que du carton imprimé?

Ces efforts ont permis d'aboutir à un résultat dont toute l'industrie helvète peut se réjouir. Disons-le: un sommet aujourd'hui inaccessible, même au plus têtu des Japonais, au plus obstiné des Chinois.

Permettez, amis lecteurs, que je vous dévoile enfin le cœur et les entrailles des chefs-d’œuvre:

Cadran en carton massif imprimé

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Aiguilles bleuies:

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Platine, empierrage, roues et ponts:

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Raquette, réglage fin, balancier équilibré, roues à dents cariées:

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Délicats reflets:

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Sincèrement, quand on voit ça, on se demande vraiment pourquoi certains perdent leur temps à bricoler des tocantes

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Je sais, c'est c.n, mais, par ce temps, ça réchauffe.

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Je tiens beaucoup à ma montre, c'est mon Grand Père qui me l'a vendue sur son lit de mort (W. Allen)

Ed the Grocer (modérateur)
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Paris,
08/02/18, 14:32

@ capitaine56

Revue de goussets Chonomètre & Chronographe

Ah, Capitaine, tu pointes du doigt une partie de l'histoire de l'horlogerie suisse, que nos Brillantes Manufactures actuelles, débordantes de Bienfacture, ont tendance à oublier : la production de montres économiques, qui permettait à tous de bénéficier d'un Garde-Temps, certes fortement simplifié, mais démocratique : une activité non seulement lucrative, mais aussi honorable, et mécanisée très tôt.

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Ed the Grocer ancienne maison l'Epicier

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